Des chèvres peu communes pour des produits hors du commun
Fromages de chèvre lactiques frais et affinés, tommes, brousses et colis de viande de chevreaux élevés sous la mère… Les produits de La Draille des Roves ne sont pas seulement bons. Ils symbolisent aussi une manière de travailler avec les bêtes, en parfaite symbiose avec la nature. Rencontre.
Une poignée de kilomètres et plusieurs dizaines de lacets permettent de rejoindre Villars Brandis. C’est là, dans ce hameau d’altitude rattaché à la commune de Castellane, que poussent de belles et majestueuses … chèvres du Rove. Sous le regard extrêmement bienveillant de Perrine Cadoret, le troupeau se déploie au rythme des saisons sur les drailles du Verdon. Ces drailles, qui ont donné leur nom à l’exploitation locale, ce sont les pistes empruntées quasi quotidiennement par Perrine et ses bêtes. « La chèvre du Rove se prête bien à l’élevage pastoral », confie la chevrière avec passion. « Elle est vraiment adaptée à la manière dont je voulais travailler, c’est-à-dire en « gardant » et en étant la plus proche possible des animaux. Cela permet d’entretenir le milieu parce qu’avec le troupeau, quand on ne met pas de filets, on peut aller où on veut et où on a besoin, sans jamais surpâturer ».
La chèvre du Rove, qui est également bien adaptée au climat et aux chaleurs estivales, fournit ensuite un lait « qualiteux » que Perrine destine d’abord aux chevreaux, avant de s’en servir pour fabriquer du fromage. Le lait rapporte pourtant plus que la viande (ce qui explique que beaucoup de chevriers font partir leurs cabris à l’engraisseur huit jours après leur naissance). Mais, ici, il est d’abord destiné aux petits, qui restent au moins deux mois sous leur mère avant de partir à la boucherie. « Le lait est qualiteux mais il n’y pas de quantité avec cette race. Par contre, elle fait des beaux chevreaux avec une bonne conformation : il y a du muscle, ils ne sont pas très grands mais bien charpentés, et ça les aide à marcher dans la montagne. Ça fait de bons animaux pour la boucherie ». Et Perrine assume pleinement ce choix. « Quitte à choquer certaines personnes, je préfère ne pas considérer mes chevreaux comme un déchet et les envoyer à la casse ou à l’engraisseur à 8 jours. Donc on les élève tous sous la mère. Je commence le fromage après tout le monde parce que les petits boivent tout le lait les deux premiers mois, mais cela donne une ambiance sympa dans la chèvrerie d’avoir toute cette marmaille qui cabriole. Et je pense que les chèvres apprécient aussi. C’est cohérent de vendre les cabris pour la viande. C’est les considérer pour ce qu’ils sont et puis c’est clair avec le troupeau. On a un deal : je les nourris, je les protège, je les soigne et en échange elles me donnent du lait et leurs petits. C’est un cercle vertueux. Car si on veut du bon fromage, il faut du lait, donc il y a des cabris. Et c’est normal de tout consommer ».
En l’occurrence, on parle donc d’une viande peu connue, qui a beaucoup perdu en notoriété, mais qui affiche pourtant de nombreux atouts. « Quand le chevreau a été élevé sous la mère, on obtient une viande rosée, extrêmement tendre et, contrairement à ce que beaucoup de personnes pensent, qui n’est pas forte du tout. On est entre l’agneau et le veau, avec un muscle tendre et fondant. Cette viande est également intéressante d’un point de vue nutritionnel : comme elle est très peu grasse, elle est saine et très bonne pour la santé ».
On retrouve ce même souci de la qualité et du travail bien fait dans chacun des fromages estampillés « La Draille des Roves ». Perrine, qui les vend de manière quasi exclusive au marché de Castellane (on en trouve également à La Maison Bio, toujours à Castellane, et chez quelques hébergeurs), a toujours d’excellents retours. Des fromages lactiques frais, très doux, dans lesquels on retrouve des arômes de fleurs mais également « beaucoup d’amour ! Parce que je prends le temps de les soigner un par un, de les retourner deux fois… Le fromage, c’est un produit dont on pourrait se passer, alors quand on en mange, il faut que ce soit un réel plaisir ! ».
« Le cabri, c’est une viande à traiter avec considération, à ne surtout pas brusquer. Il faut donc utiliser des cuissons lentes et douces, à 130 – 140 degrés, pas plus. On peut se permettre de monter à 150 à la fin pour caraméliser un peu et, après, c’est extraordinaire ! Et puis c’est facile à cuisiner. Le matin vous mettez dans votre cocotte vos légumes et votre viande et vous laissez cuire tout doux sur le feu. A midi, ou le soir, vous vous régalez sans avoir fait grand-chose ».
Les fromages sont vendus sur le marché de Castellane, tous les mercredis, de fin avril jusqu’à novembre. On les trouve également à l’épicerie « La Maison Bio » à Castellane.
La viande de cabri léger est disponible uniquement sur commande, d’avril à juillet. La Draille des Roves propose également des produits transformés (pâtés, saucisses…) ou des plats cuisinés. Des cabris lourds (qui ont passé l’été) peuvent également être réservés.
Renseignements et réservations au 06 87 14 63 79
La chèvre du Rove est la seule race mixte caprine française. Au niveau national, la production traditionnelle de cette race est le chevreau, en particulier le cabri lourd. La plupart des éleveurs transforme le lait à la ferme pour faire des fromages, en particulier de la brousse (lire ci-dessous). C’est une race rustique, adaptée aux climats chauds et secs. Elle a été reconnue officiellement par le Ministère de l’Agriculture dans les années 90. Le dernier inventaire montre que la majorité des élevages se trouve dans le Sud-Est de la France et en particulier en Provence, d’où la race est originaire.
Les habitants des Bouches-du-Rhône, et plus particulièrement ceux de la Côte Bleue, connaissent bien le village du Rove. Célèbre pour ses plages … et son fromage de chèvre ! La fameuse brousse du Rove, dont le nom est directement issu des chèvres éponymes. Ce fromage de chèvre frais au lait entier bénéficie d’une Appellation d’Origine Protégée (AOP) depuis 2020. Il est principalement produit dans le département des Bouches-du-Rhône mais également dans le sud du Vaucluse ainsi que dans l’ouest du Var. Huit producteurs de lait, huit producteurs fermiers et huit ateliers de transformation constituent la filière « Brousse du Rove AOP ».
Le hameau de Villars Brandis étant beaucoup trop éloigné, la brousse produite par La Draille des Roves n’a donc pas droit au même nom, ni au même label … Mais de l’avis de nombreux touristes bucco-rhôdaniens en vacances dans le Haut-Verdon, ce sont bien les seules choses qui distinguent la brousse du Rove de celle de Villars.
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